mardi 9 septembre 2008

Téléchargement illégal : le lâcher-prise de Metallica

Le fait que le nouvel album de Metallica, Death Magnetic, circulait déjà sur les réseaux peer-to-peer une semaine avant sa sortie, prévue le 12 septembre, fait figure d’épiphénomène, au terme d’une campagne de marketing en ligne menée tambour battant pendant cinq mois, au point que les membres du groupe, jadis beaucoup moins tolérants à l’égard du téléchargement illégal, se félicitent ouvertement de ces fuites.

Voilà bientôt cinq mois que Metallica fait monter la sauce sur Internet, autour de la sortie de son nouvel album Death Magnetic, le premier depuis cinq ans. Le groupe de heavy metal, qui s’est illustré au début des années 2000 en fustigeant le réseau P2P Napster, au risque de se mettre de nombreux fans à dos, a orchestré une vaste campagne de marketing en ligne qui fera certainement date. Au point de susciter une attente qui devrait propulser son nouvel opus en tête des classements dès sa sortie, prévue le 12 septembre.

Depuis le mois d’avril dernier, un site dédié, Mission Metallica, permet aux fans du groupe de suivre en direct la réalisation de l’album et d’accéder à des vidéos exclusives, tournées en studio ou sur scène, ainsi qu’à quelques riffs de l’album en exclusivité. Au début de l’été, un coffret Mission Metallica est sorti, contenant une carte Premium donnant accès à des contenus en ligne inédits et exclusifs sur le site www.missionmetallica.com, alimenté par le groupe quotidiennement, ainsi qu’un bon pour obtenir le CD du nouvel album dès sa sortie, avec la possibilité, pour les acheteurs, de le télécharger sur Internet dès le 11 septembre à minuit.
Une version Collector de ce coffret est également disponible depuis le 15 juillet, qui permettra d’obtenir l’album dans un package en forme de cercueil le jour de sa sortie, avec en prime une dizaine de démos de chansons du nouvel album, un DVD contenant des images exclusives du groupe en studio, et une carte Collector permettant de télécharger le concert événement que Metallica prévoit de donner en Europe ce mois-ci.

Death Magnetic sera par ailleurs le premier album à sortir simultanément dans les bacs et dans une version adaptée au jeu vidéo Guitar Hero III, un nouveau circuit de promotion et de distribution devenu incontournable en l’espace d’un an. Après avoir appâté le chalan pendant des mois, Metallica n’a plus qu’à ferrer son public.

Le groupe de heavy metal a saisi le taureau d’Internet par les cornes

N’ayant pu encore joindre le service de presse de Barclay, le label d’Universal Music qui distribue l’album en France, nous ne disposons encore d’aucune indication sur les retours que cette campagne de marketing en ligne a suscités, ni sur les ventes du coffret Mission Metallica. Mais il suffit de jeter un oeil sur la couverture médiatique dont fait l’objet la sortie de ce nouvel album, en France et à l’étranger, pour mesurer le buzz que Metallica est parvenu à générer.

Manifestement, la plus grande décontraction règne au sein du groupe, au point que son batteur, Lars Ulrich, l’un des artistes qui furent les plus prompts à dénoncer le téléchargement illégal au cours de la décennie passée, ne prend même pas ombrage du fait que l’album Death Magnetic circule depuis une semaine sur les réseaux peer-to-peer. On peut même dire qu’il s’en félicite.
"S’il continue à fuiter un peu partout dans le monde aujourd’hui ou demain, que demande le peuple... Nous sommes en 2008. Ca fait partie de la manière dont les choses se passent aujourd’hui, c’est normal. Nous sommes contents", a-t-il confié lors d’une interview récente accordée à une station de radio californienne.

Une belle leçon de "lacher-prise", que devraient méditer les prosélytes du projet de loi Création et Internet en France. Saisissant le taureau d’Internet par les cornes, Metallica a tout fait, non sans réussite, pour réduire les fuites de son nouvel album sur les réseaux peer-to-peer à un épiphénomène, lequel ne fait que rajouter au buzz orchestré depuis cinq mois, dans la dernière ligne droite avant sa sortie.
Au point qu’on peut se demander si le fait d’avoir approvisionné certains détaillants avec une bonne semaine d’avance – un disquaire parisien serait à l’origine de la vente prématurée de quelques exemplaires de Death Magnetic, aussitôt rippés et mis en ligne sur les principaux serveurs de trackers BitTorrent – ne faisait pas partie de la stratégie de marketing globale de la maison de disques du groupe.

Source: Philippe ASTOR

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